Aspartame

Édulcorants intenses : pas d’intérêt nutritionnel démontré pour les usages alimentaires

Aspartame, extraits de stévia, sucralose, acésulfame K,… l’appellation « édulcorants intenses » regroupe différents additifs au pouvoir sucrant très élevé sans apport de calories. Si la sécurité d’emploi des édulcorants a fait l’objet régulièrement d’évaluations approfondies, l’Anses a souhaité expertiser leur intérêt nutritionnel pour la première fois. Ce travail pionnier ne démontre aucun bénéfice de la consommation d’édulcorants intenses sur le contrôle du poids, la glycémie chez les sujets diabétiques ou l’incidence du diabète de type 2. II ne permet pas non plus d’établir de lien entre la consommation des édulcorants et l’habituation au goût sucré, ni de lien avec des risques accrus de diabète ou de cancers. Sur cette base, l’Agence estime qu’il n’existe pas d’élément probant permettant d’encourager la substitution du sucre par des édulcorants intenses dans le cadre d’une politique de santé publique.

Obtenues par synthèse chimique ou extraites de végétaux, les substances appelées « édulcorants intenses » sont des additifs utilisés par l’industrie agroalimentaire pour leur pouvoir sucrant plusieurs dizaines à plusieurs milliers de fois supérieur à celui du saccharose.

En France, les édulcorants intenses les plus utilisés sont l’aspartame, l’acésulfame K et le sucralose. Ils sont consommés dans un objectif de réduction de la consommation de sucres et de l’apport énergétique, et comme aide au contrôle de la glycémie chez les sujets diabétiques.

L’emploi et la consommation d’édulcorants intenses ont connu une forte augmentation au cours des vingt dernières années, probablement en lien avec les préoccupations liées au doublement de la prévalence du surpoids et de l’obésité (1). Si les risques potentiels liés à chaque édulcorant intense sont évalués lors de leur autorisation, aucune évaluation globale concernant les risques et les bénéfices nutritionnels de ces produits n’avait été conduite au niveau européen jusqu’à ce jour.

Bénéfices et risques nutritionnels potentiels de la consommation de produits contenant des édulcorants intenses

L’utilisation des édulcorants intenses en substitution des sucres entraîne dans la plupart des cas un moindre apport énergétique à court terme du fait de leur faible apport calorique et de l’absence de compensation. Cependant, les données disponibles portent sur des durées insuffisantes pour garantir le maintien de cet effet à long terme. De plus, les études sur le contrôle du poids chez l’adulte comme chez l’enfant ont rapporté des associations contradictoires. Certaines études d’observation montrent que l’utilisation d’édulcorants intenses est paradoxalement associée à un gain de poids, sans que la causalité de cette association n’ait été établie.

Il n’a pas été démontré de bénéfice de la consommation d’édulcorants intenses sur la prévention de l’apparition du diabète de type 2, et chez les sujets diabétiques, il n’a pas été démontré de bénéfice de la consommation régulière d’édulcorants intenses en substitution du sucre sur le contrôle de la glycémie.

A l’issue de ce travail, l’Agence considère que :

  • concernant les bénéfices nutritionnels, les études disponibles ne permettent pas de prouver que la consommation de produits contenant des édulcorants intenses présente un intérêt sur le contrôle du poids, de la glycémie des sujets diabétiques ou sur l’incidence du diabète de type 2 ;
  • concernant les risques, notamment le développement d’un cancer, d’un diabète de type 2 ou d’un accouchement prématuré, les données disponibles à ce jour ne permettent pas d’établir un lien entre la survenue de ces risques et la consommation d’édulcorants intenses. Quelques études soulignent toutefois la nécessité d’approfondir les connaissances entre la consommation d’édulcorants intenses et certains risques.

Les recommandations de l’Agence

Dans son évaluation, l’Anses met en évidence le déficit de données pertinentes sur les bénéfices potentiels de la consommation d’édulcorants, dans le contexte d’une utilisation pourtant large et ancienne de ceux-ci dans le cadre alimentaire.

Elle souligne la nécessité de mener de nouveaux travaux de recherche tant sur les bénéfices que sur les risques nutritionnels liés à la consommation des édulcorants, et en particulier :

  • chez l’enfant, des travaux relatifs au développement du goût, des préférences alimentaires et au contrôle de la prise alimentaire ;
  • en population générale, des travaux relatifs au contrôle du poids.

Par ailleurs, les populations spécifiques (femmes enceintes, enfants, sujets diabétiques, consommateurs réguliers) n’ont pas fait l’objet de suffisamment de travaux. Il apparaît donc nécessaire d’étudier davantage les risques liés à la consommation d’édulcorants intenses par ces populations.

Enfin, dans un contexte de politique nutritionnelle où l’un des objectifs prioritaires est la réduction des apports en sucres dans la population générale, l’Anses estime qu’il n’existe pas d’élément probant permettant d’encourager, dans le cadre d’une politique de santé publique, la substitution des sucres par des édulcorants intenses. Cet objectif de réduction des apports en sucres doit être atteint par la réduction globale du goût sucré de l’alimentation, et ce dès le plus jeune âge. A ce titre, l’Agence recommande que les boissons édulcorées et les boissons sucrées ne se substituent pas à la consommation d’eau.  


1:  8,5 % en 1997, 15% en 2012 (données Obepi)