Compléments Alimentaires

Nutrivigilance : l’Anses met en consultation un avis sur les compléments alimentaires à base de levure de riz rouge

La « levure de riz rouge » est utilisée dans de nombreux compléments alimentaires revendiquant le « maintien d’une cholestérolémie à un niveau normal ». L’Anses a reçu 25 signalements d’effets indésirables (majoritairement des atteintes musculaires et hépatiques) susceptibles d’être liés à la consommation de ce type de compléments alimentaires.  Au regard de ces éléments, l’Anses considère que l’usage de compléments alimentaires à base de levure de riz rouge peut exposer les consommateurs à des risques pour la santé, notamment ceux particulièrement sensibles du fait de prédispositions génétiques, de pathologies ou de traitements en cours, etc.-. L’Agence met aujourd’hui son avis en consultation auprès des différentes parties prenantes et des agences sanitaires européennes. Elle rappelle que ces produits ne doivent pas être utilisés par les patients traités avec des médicaments à base de statine, ni ceux ayant dû arrêter ces médicaments suite à l’apparition d’effets indésirables (patients dits « intolérants aux statines »). Ils ne doivent pas non plus être consommés par les personnes sensibles (femmes enceintes et allaitantes, enfants et adolescents, sujets de plus de 70 ans ou atteints de certaines pathologies, et forts consommateurs de pamplemousse,…). L’Anses recommande aux personnes concernées de prendre conseil auprès d’un professionnel de santé avant de consommer ces produits.

La « levure de riz rouge » est une moisissure de couleur rouge cultivée sur du riz. Elle est présente dans de nombreux compléments alimentaires revendiquant le « maintien d’une cholestérolémie à un niveau normal ». Les consommateurs utilisent ces compléments alimentaires en supplément, en remplacement ou comme alternative à un traitement hypocholestérolémiant. La levure de riz rouge contient en effet plusieurs molécules appelées monacolines dans des teneurs souvent très variables d’un produit à l’autre. L’une de ces substances, la monacoline K, présente les caractéristiques pharmacologiques des statines, c'est-à-dire la capacité d’inhibition d’une enzyme (HMG-CoA réductase) intervenant dans la voie de synthèse du cholestérol. La monacoline K est ainsi commercialisée en tant que médicament sous la dénomination commune internationale de « lovastatine » aux Etats-Unis, au Canada, en Allemagne, en Autriche, en Espagne, au Portugal et en Grèce, mais pas en France.

Depuis la création de son dispositif de nutrivigilance en 2009, l’Anses a reçu 25 signalements bien documentés d’effets indésirables susceptibles d’être liés à la consommation de compléments alimentaires contenant de la « levure de riz rouge ». Parmi les 12 cas d’imputabilité très vraisemblable ou vraisemblable, figurent notamment :

  • une majorité d’atteintes musculaires (myalgies souvent violentes) ;
  • et trois atteintes hépatiques associées ou non à une atteinte musculaire.

Les signalements de nutrivigilance constatés en France ou dans d’autres pays nous ayant communiqué des cas de ce type sont en parfaite cohérence avec les cas cliniques bien documentés dans la littérature scientifique pour la lovastatine. Il apparaît à l’issue de cette évaluation que, dans les conditions actuelles, l’usage de complément alimentaire à base de levure de riz rouge contenant des monacolines peut exposer les consommateurs, notamment ceux particulièrement sensibles du fait de prédispositions génétiques, de pathologies ou de traitements en cours, etc., à des risques pour la santé ; et ce d’autant plus que cette consommation n’est pas assortie d’un conseil et d’un suivi médical.

Pour réguler le marché, en évitant notamment le développement d’une communication trompeuse sur les bénéfices de certains produits alimentaires, la commission européenne a prévu que toute allégation de santé fasse l’objet d’une évaluation scientifique sur la base d’un dossier fourni par les industriels demandeurs. Dans ce cadre, les compléments alimentaires à base de levure de riz rouge contenant une quantité suffisante de monacoline K peuvent se prévaloir de l’allégation : « contribue au maintien d’une cholestérolémie normale ». Dans son avis du 26 mai 2011 (PDF), l’Anses avait souligné les difficultés que pourraient occasionner une évaluation des bénéfices des produits sans une évaluation des risques concomitante.

Afin de recueillir le maximum de données pour affiner son évaluation, l’Anses a souhaité soumettre le présent avis à consultation auprès des différentes parties prenantes (association de consommateurs, industriels,…) et des autorités (Agences internationales, etc…), jusqu’au 15 décembre 2013. Compte tenu de la libre circulation des marchandises sur le territoire de l’Union européenne, cette consultation permettra de mettre à disposition des autorités le maximum d’informations scientifiques provenant de l'ensemble des Etats membres  afin de porter ce dossier au niveau communautaire.

Les contributions pourront être envoyées à l’adresse suivante : consultation-LRR@anses.fr

En attendant la publication de l’avis définitif de l’Agence et les décisions des autorités, l’Anses souhaite rappeler que :

  • l’hypercholestérolémie n’étant pas une maladie mais un facteur augmentant le risque de survenue de maladie cardio-vasculaire, un régime diététique adapté et la pratique d’exercices physiques réguliers sont à entreprendre afin de faire baisser la cholestérolémie en prévention primaire ;
  • il est préférable de prendre conseil auprès d’un professionnel de santé avant de consommer des compléments alimentaires à base de levure de riz rouge, plus particulièrement les personnes suivant des traitements médicamenteux ;
  • les patients traités avec des médicaments hypocholestérolémiants à base de statine ainsi que les patients ayant dû arrêter ces médicaments suite à l’apparition d’effets indésirables (patients dits « intolérants aux statines »), doivent s’abstenir de consommer de tels compléments alimentaires ;
  • les compléments alimentaires à base de levure de riz rouge ne peuvent pas être une alternative à un traitement médicamenteux hypocholestérolémiant ;
  • les populations sensibles suivantes ne doivent pas consommer ces compléments alimentaires :
  • les femmes enceintes, allaitantes ou en âge de procréer qui n’ont pas de contraception ;
  • les enfants et adolescents ;
  • les sujets âgés de plus de 70 ans ;
  • les personnes atteintes de pathologies prédisposantes telle qu’une insuffisance rénale, une pathologie musculaire ou une hypothyroïdie non traitée ;
  • les patients souffrant d’atteinte hépatique évolutive ;
  • les porteurs de polymorphismes génétiques pouvant augmenter les concentrations plasmatiques des statines ;
  • les personnes traitées par des médicaments pouvant interférer avec le métabolisme des lipides et des statines ;
  • les forts consommateurs de pamplemousse (jus ou fruit) ou d’alcool.

Il convient de rappeler également que tout effet indésirable survenant après consommation de compléments alimentaires contenant de la « levure de riz rouge » doit être signalé à un professionnel de santé afin que celui-ci puisse le notifier à l’Anses dans le cadre de la nutrivigilance.