Abeilles
17/01/2013 3 min

Point d’information sur l’évaluation des risques des pesticides pour les colonies d’abeilles

Dans des avis publiés ce jour, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) met en évidence dans certains cas des risques sur la santé des colonies d’abeilles - et/ou l’insuffisance de données pour finaliser l’évaluation des risques-, liés à l’exposition à des insecticides à base de trois substances de la famille des néonicotinoïdes. Ces conclusions s’appuient notamment sur les travaux en cours depuis plusieurs années pour élaborer un nouveau document d’orientation au niveau européen, visant à mieux intégrer l’ensemble des connaissances scientifiques disponibles. 

Suite à ces avis de l’EFSA, qui confirment certaines incertitudes relevées par l’Anses dans son avis du 31 mai 2012 après la publication d’une étude sur les effets néfastes sur le comportement des abeilles d’une dose sublétale d’une substance néonicotinoïde, l’Agence appelle à la finalisation du nouveau document d’orientation européen pour actualiser l’évaluation des substances et produits phytopharmaceutiques dans le cadre de règles renforcées au regard des risques pour les colonies d’abeilles.

Suite à la publication en mars 2012 d’une étude (Henry et al. 2012) rapportant, sur une base expérimentale, les effets sur les abeilles du traitement par une substance néonicotinoïde de semences de culture nectarifère (type Colza), l’Anses avait été saisie par le ministère chargé de l’agriculture d’une demande d’appui scientifique et technique sur les conséquences éventuelles à en tirer.

L'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) avait été saisie du même sujet par la Commission Européenne.

Dans le cadre de ce travail, l’Anses concluait dans un avis du 31 mai 2012 que les résultats présentés dans l'étude mettaient en évidence les limites des méthodes mises en œuvre pour évaluer a priori les effets potentiels des produits sur le comportement des abeilles. Elle recommandait d'engager une réévaluation au niveau européen des substances actives néonicotinoïdes, sur la base des données scientifiques nouvelles issues des études récentes, et de procéder à une évolution de la réglementation européenne pour une prise en compte renforcée des impacts de ces substances sur le comportement des abeilles.

Le travail publié aujourd’hui par l’EFSA s’inscrit dans cette perspective. Il concerne 3 substances néonicotinoides (clothianidine, imidaclopride et thiamethoxam), et met en évidence dans certains cas des risques sur la santé des colonies d’abeilles - et/ou des manques de données pour évaluer ces risques. 

Pour réaliser ces travaux, l’EFSA s’est fondée sur les principes mentionnés dans un projet de nouveau document d’orientation européen pour l’évaluation des risques des pesticides pour les colonies d’abeilles, en cours de discussion au niveau communautaire. L’Anses, qui a déjà transmis ses commentaires, appelle donc à une adoption rapide d’un document final.

Il faut noter que l’Anses avait, dans le cadre de l’instruction des dossiers de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques, mis en place dès l’apparition de ces nouveaux types de produits phytosanitaires sous forme de semences enrobées à partir de substances néonicotinoïdes, des exigences complémentaires au cadre réglementaire européen. Dans ce contexte, les produits et usages autorisés en France ne représentent que 5% de l’ensemble des produits et usages autorisés dans au moins un pays en Europe.

Par ailleurs, la survenue d’un incident imputable à certaines pratiques dans les premiers temps d’utilisation de ces semences enrobées a conduit les pouvoirs publics, sur recommandation de l’Anses, à imposer par arrêté des dispositions particulières pour réduire fortement l’exposition des abeilles aux poussières. Cet élément propre à la France n’a pas été pris en compte dans l’évaluation réalisée par l’EFSA, qui met justement en évidence l’importance des risques liés à l’exposition aux poussières.

L'Anses rappelle dans un cadre plus général que le phénomène de mortalité des abeilles est d'origine multifactorielle et nécessite d'agir sans attendre sur l'ensemble des facteurs pouvant intervenir. Dans ce cadre, en tant que laboratoire de référence de l'Union européenne (LR-UE), l'Anses pilote un vaste programme de surveillance épidémiologique en Europe visant à mieux caractériser le phénomène de mortalité des abeilles. Le programme de travail du LR-UE pour la santé des abeilles prend en compte les agents pathogènes et l’exposition aux produits phytosanitaires (dont les néonicotinoïdes) dans les facteurs d'affaiblissement des ruches. 

Enfin, l'Anses a mis en place en 2012 un groupe d'experts dédié destiné à mieux comprendre les effets sur le devenir des colonies des co-expositions aux pesticides et aux agents pathogènes, en vue d'éventuelles recommandations, d'ici à 2014, pour leur prise en compte dans la réglementation, en complément des travaux menés par l'EFSA.