29/07/2016 4 min

L’Anses se prononce sur les critères d’identification des perturbateurs endocriniens

L’Anses a été saisie en mai 2016 pour proposer des critères définissant les perturbateurs endocriniens (PE). Au cours de l’instruction de cette saisine, la Commission européenne (CE) a rendu publique, le 15 juin 2016, sa proposition de critères d’identification des PE, attendue depuis fin 2013. L’Anses publie ce jour les résultats de son expertise, dont le champ a dû évoluer afin d’intégrer le projet de la Commission. Dans ses conclusions, l’Agence recommande de retenir la définition et les critères d’identification des PE de l’option 3 de la feuille de route de la Commission européenne de 2014, permettant de distinguer les PE en trois catégories : « avérés », « présumés » et « suspectés ». L’Agence préconise par ailleurs que la classification des PE soit réalisée par une instance européenne unique, de manière à éviter tout risque de divergence de classification pour une substance donnée.

Le 15 juin dernier, la Commission européenne (CE) rendait publique sa proposition de critères d’identification des perturbateurs endocriniens (PE), accompagnée de plusieurs textes visant à proposer des amendements  aux règlements en vigueur relatifs aux produits biocides et aux produits phytopharmaceutiques. Dans ce cadre, la Ministre de l’Environnement, de l’Energie et de la Mer, en charge des relations internationales sur le climat a demandé à l’Agence de proposer des critères définissant les PE qui pourront servir à définir la contribution française aux discussions communautaires actuelles sur cette question. 

L’Agence a mis en place dans ce contexte un groupe d’expertise collective en urgence afin d’examiner, d’une part, la feuille de route de la CE de 2014, soumise à consultation publique, qui proposait quatre options pour les critères d'identification des PE et trois options relatives aux approches réglementaires pour la prise de décision. D’autre part, ont été examinées la communication de la CE du 15 juin 2015 et ses propositions de modifications des règlements relatifs aux produits biocides et aux produits phytopharmaceutiques.

Les recommandations de l’Agence

Après analyse des quatre options proposées par la CE, l’Agence recommande de retenir la définition et les critères d’identification PE de l’option 3 de la feuille de route de 2014, fondée sur la définition de l’OMS/IPCS de 2002 qui fait consensus. En effet, cette option propose de distinguer les PE en trois catégories : PE « avérés », « suspectés » ou « substances endocrines actives ». L’Agence propose une distinction, comme cela figure dans la Stratégie Nationale sur les Perturbateurs Endocriniens (SNPE), en classant les PE en trois catégories :« avérés », « présumés » et« suspectés ». Cette distinction, qui s’apparente au système de classification européen défini par le règlement n°1272/2008 (CLP[1]), permettrait que son application soit rendue rapidement opérationnelle.

Par ailleurs, selon les experts, cette option offre une meilleure garantie de la prise en compte de l’ensemble des données disponibles sur une substance à un instant donné. A l’image de ce qui est actuellement fait pour les substances cancérogènes, mutagènes, reprotoxiques (CMR), une approche graduée permettrait de mieux prendre en compte les incertitudes et faciliter le jugement d’experts.

De plus, cette catégorisation permettrait une déclinaison réglementaire adaptée. Des niveaux d’encadrement différenciés pourraient ainsi être introduits en fonction des usages et des populations exposées (par exemple, une règlementation plus sévère pour les jouets avec interdiction des PE « avérés », « présumés » et « suspectés »).

La proposition de la CE repose sur une seule catégorie, écartant la notion de PE suspecté (Potential endocrine disruptor) de la définition des PE de l’OMS/IPCS. Néanmoins, elle prend en compte les effets sur l’Homme et les organismes non-cibles de l’environnement, ce qui est indispensable pour une évaluation globale des effets des PE. Toutefois, l’Agence estime que la notion d’organisme cible devrait quant à elle être définie et appliquée par chacun des règlements concernés. Ainsi, l’Anses recommande de ne pas distinguer l’identification d’un PE pour l’Homme ou l’environnement.

Par ailleurs, l’Agence préconise également que la classification harmonisée des PE soit réalisée par une instance européenne unique, qui pourrait être l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA), afin d’éviter tout risque de divergence de classification pour une substance donnée. Cette classification serait prononcée indépendamment de toute mise en œuvre particulière portée par une réglementation spécifique.

Enfin, un guide technique, modifiable en fonction des avancées scientifiques, pourrait être élaboré afin de préciser les critères d’évaluation et de classification des PE (niveau de preuve nécessaire à l’inclusion dans chacune des catégories, type d’étude utilisable pour évaluer le niveau de preuve, etc.).


[1] Règlement relatif à la classification, à l’étiquetage et à l’emballage des substances chimiques et de leurs mélanges. Le règlement CLP a pour objet d'assurer que les dangers que présentent les substances chimiques soient clairement communiqués aux travailleurs et aux consommateurs de l'Union européenne grâce à la classification et à l'étiquetage des produits chimiques.