La fièvre hémorragique de Crimée-Congo, un risque d’émergence en France
Transmise par certaines tiques, la fièvre hémorragique de Crimée-Congo est une maladie potentiellement mortelle pour l’être humain. Si aucun cas humain autochtone n’a encore été déclaré en France, le risque d’émergence de cette maladie sur le territoire est réel.
Comment se transmet la fièvre hémorragique de Crimée-Congo ?
Le virus de la fièvre hémorragique de Crimée-Congo (FHCC) est principalement transmis aux animaux ou à l’être humain par piqûres de tiques du genre Hyalomma. L’espèce Hyalomma marginatum est présente depuis plusieurs décennies en Corse et depuis 2015 sur le littoral méditerranéen français. Le dérèglement climatique pourrait contribuer à étendre l’aire d’implantation de ces tiques.
La transmission par contact direct, principalement avec le sang et/ou les tissus et organes d’animaux ou d’êtres humains infectés est également possible mais plus rare.
Quels sont les symptômes ?
Chez l’humain, la fièvre hémorragique de Crimée-Congo se manifeste généralement par un syndrome grippal avec troubles digestifs, ce qui ne permet pas de la distinguer des symptômes classiques d’une grippe intestinale. Dans certains cas, elle peut néanmoins s’aggraver et se traduire par un syndrome hémorragique, dont le taux de létalité est de 5 à 30 % selon les cas.
Quelle est la situation actuelle et le risque d’émergence en France ?
À l’heure actuelle, aucun cas de contamination humaine n’a été recensé en France. En revanche, le virus de la fièvre hémorragique de Crimée-Congo a été détecté en octobre 2023 dans des tiques du genre Hyalomma collectées sur des bovins élevés dans les Pyrénées-Orientales. Une dizaine de cas humains autochtones de FHCC ont été rapportés en Espagne depuis 2013, dont certains ont provoqué le décès du malade. La transmission du virus à l’être humain en France est donc possible.
Comment éviter la contamination par le virus pour la population générale ?
Les principales recommandations de prévention de la fièvre hémorragique de Crimée-Congo sont les mêmes que celles habituellement préconisées pour éviter la transmission d’agents pathogènes par des tiques, à savoir :
- lors des promenades dans la nature, porter des chaussures fermées et des vêtements couvrants de couleur claire, afin de mieux repérer les tiques sur la surface du tissu,
- éviter de marcher au milieu des herbes hautes, des buissons et des branches basses et privilégier les chemins balisés,
- utiliser éventuellement des répulsifs cutanés avec autorisation de mise sur le marché (AMM), en respectant les préconisations d’usage,
- s’inspecter au retour des promenades en forêt, dans le maquis et la garrigue ou dans le jardin notamment au niveau des plis de la peau sans oublier le cuir chevelu,
- en cas de piqûre, détacher immédiatement les tiques fixées à l’aide d’un tire-tique, une pince fine ou à défaut vos ongles et désinfecter la plaie,
- surveiller la zone de piqûre pendant plusieurs jours et consulter votre médecin en cas de symptômes (rougeur, fièvre…).
Les données disponibles ne montrent pas de transmission du virus par la consommation de produits laitiers au lait cru et de viande d’animaux infectés.
Quelles sont les recommandations pour les professionnels et les chasseurs ?
Dans une expertise publiée en 2024, l’Anses a identifié des professions et des activités entraînant un risque d’être exposé à la FHCC par le contact avec le sang et/ou les tissus et organes d’un animal infecté. Les vétérinaires, les opérateurs des abattoirs, les chasseurs et leurs accompagnateurs sont les plus à risque. Les éleveurs et les propriétaires de ruminants et d’équidés peuvent aussi être exposés s’ils manipulent un animal pouvant saigner ou lorsqu’ils retirent manuellement des tiques du genre Hyalomma.
Il est conseillé à ces personnes de respecter scrupuleusement les mesures d’hygiène et porter des équipements de protection individuels adaptés tels que des gants, des vêtements de protection, des masques, des lunettes ou des visières, lors de manipulation d’un animal vivant pouvant engendrer une effusion de sang ou lors de la manipulation de viande et d’abats issus d’animaux récemment abattus ou chassés.
Quel est le rôle de l’Anses dans la lutte contre la fièvre hémorragique de Crimée-Congo ?
L’Anses a mené plusieurs expertises afin d’évaluer le risque d’émergence de cas humains en France et de recommander les mesures pour surveiller l’évolution de l’implantation du virus et éviter les contaminations. Ses laboratoires participent également à des projets et des travaux de recherche sur le virus et les tiques. L’Agence préconise d’intensifier les campagnes d’information et de sensibilisation des professionnels à risque d’exposition et des chasseurs.
Dans la mesure où les animaux contaminés par le virus ne présentent pas de symptômes, et où les symptômes chez l’homme ne sont pas spécifiques, hormis les cas graves, l’Anses a fortement recommandé la mise en place d’une surveillance nationale des tiques du genre Hyalomma et des agents pathogènes dont elles sont portuses, qui est le seul moyen pour identifier l’éventuelle progression de l’aire d’implantation du virus.
Enfin, elle préconise de mener des recherches pour mieux comprendre les facteurs influençant l’épidémiologie et la dynamique spatio-temporelle du virus de la FHCC et de ses tiques vectrices.