Fish Pedicure

Fish pédicure : des pratiques à encadrer

Évaluation des risques liés à la pratique d’immersion des pieds dans un bac d’eau contenant des poissons de l’espèce Garra rufa

Face au développement en France de la « fish pédicure », pratique de soin des pieds basée sur l’utilisation de poissons (Garra Rufa) détachant des squames de la peau, l’Anses a été saisie par le ministère chargé de la santé afin d’évaluer les risques liés à ce type de pratique. L’Agence recommande ainsi l’encadrement strict de cette pratique afin de prévenir les risques d’infection des utilisateurs et des professionnels. 

L’immersion de tout ou partie du corps dans de l’eau contenant des poissons (généralement de l’espèce Garra rufa) détachant des squames de la peau, est une pratique existant depuis de nombreuses années en Turquie, en Asie et au Moyen-Orient. Dans de nombreux pays, dont la France, un nombre croissant d’établissements propose ce type de soins -notamment une offre dite de « fish pedicure »- avançant des effets esthétiques ou de bien-être, mais également parfois des effets thérapeutiques.

Dans ce contexte, le ministère chargé de la santé a saisi l’Agence afin qu’elle évalue les risques liés à ce type de pratique esthétique d’immersion des pieds dans un bassin peuplé de Garra rufa

Pour mener à bien ce travail, l’Agence s’est appuyée sur l’expertise collective d’un groupe de travail multidisciplinaire réunissant des scientifiques spécialisés dans les risques liés à l’eau, la microbiologie, la santé des poissons, la dermatologie et impliquant deux de ses comités d’experts spécialisés. 

État des lieux des risques sanitaires 

Depuis 2010, l’offre de soins pédicure dite « fish pedicure » se développe de manière très importante en Europe, dans les établissements d’esthétique ou de « bien-être » où elle se met en place, le plus souvent en complément d’autres prestations. Bien qu’il ne soit pas possible de déterminer avec précision l’ampleur de cette pratique en France, il semblerait que plusieurs centaines d’établissements y proposent des soins de « fish pedicure ». Néanmoins, seules quelques dizaines d’entre eux respecteraient les conditions légales (notamment de détention de faune sauvage captive) nécessaires à l’ouverture. 

En effet, il ressort du travail réalisé par l’Anses que la pratique de « fish pedicure » n’est pour l’instant encadrée par aucune réglementation spécifique  sanitaire. A l’heure actuelle, les données sur la qualité de l’eau des bacs au sein des établissements pratiquant la « fish pedicure » sont rares et il n’existe aucune étude spécifique sur la présence et la survie de micro-organismes pathogènes dans les populations de Garra rufa commercialisées en France. 

Pourtant, du fait de la présence des poissons dans les bacs de pédicure, il n’est pas possible d’y maintenir une eau désinfectante, ce qui complique grandement la maîtrise des risques microbiens. Par ailleurs, plusieurs cas d’infections bactériennes liées aux pratiques de l’aquariophilie et de la pédicurie ont déjà été recensés auparavant.  

De plus, le travail de l’Agence met aussi en évidence le fait que certains clients constituent une population plus sensible aux infections : les diabétiques, les personnes immunodéprimées (sous traitement ou maladie) ou encore présentant des lésions cutanées aux pieds. 

Enfin, cette pratique semble attirer plus particulièrement des personnes avec un épaississement de la peau (hyperkératose), susceptible d’être d’origine mycosique. Ils augmentent ainsi le risque de contamination de l’eau et présentent dans le même temps une sensibilité accrue aux infections.

Conclusions et recommandations de l’Anses

Sur la base de ces différents éléments, l’Agence considère qu’il existe un risque potentiel de transmission d’agents pathogènes (d’origine humaine ou animale) par le biais de l’eau ou des poissons, au cours de la pratique de « fish pedicure ». Ce risque est probablement faible, excepté pour les populations d’usagers plus sensibles. Néanmoins, en raison du manque de données liées à cette pratique, l’Agence privilégie la collecte de données sur la qualité de l’eau et son évolution au sein des établissements proposant ce type de soin pédicure, afin de pouvoir en quantifier les risques sanitaires.

En outre, l’Anses estime nécessaire d’encadrer les pratiques de « fish pedicure » par une réglementation adaptée incluant notamment : 

  • des procédures d’admission et d’hygiène des usagers, d’hygiène de l’établissement sous la responsabilité de personnels qualifiés ; 
  • le contrôle et l’auto-surveillance du fonctionnement des installations, de la qualité de l’eau des bacs et de l’hygiène générale de l’établissement ; 
  • l’obligation de traçabilité des lots et le contrôle sanitaire des poissons ; 
  • l’information objective du public sur les dangers encourus lors de cette pratique ; 
  • l’information des personnels, y compris les travailleurs temporaires, les stagiaires et les personnels d’entreprises extérieures intervenant au sein de l’établissement, sur les risques d’infection, en particulier par des bactéries multirésistantes aux antibiotiques.
  • la nécessité du respect des règles d’hygiène au travail et la formation des personnels de ces établissements pour garantir leur sécurité et celle des usagers.