14/10/2020
Portrait
1 min

Celles qui font l'Anses - "Être prêts face à l’émergence de maladies"- Béatrice Grasland

Béatrice Grasland est cheffe d’unité « virologie, immunologie, parasitologie aviaires et cunicoles » au laboratoire Anses de Ploufragan.
Docteur en microbiologie, elle a d’abord travaillé en virologie porcine puis en virologie aviaire, notamment sur les coronavirus en santé animale.

 

 

"Construire des clones infectieux pour avoir des modèles de virus et étudier leur virulence"

beatrice grasland

Devenir chercheuse c’était pour moi une révélation. Dans la recherche, on ne se lasse jamais, l’apprentissage est infini. On peut toujours aller plus loin pour en savoir plus, et investiguer davantage. Mon travail à l’Anses consiste à étudier les virus chez les animaux, d’abord lors de mon premier poste, ceux qui affectent les filières du porc comme le circovirus porcin de type 2 qui provoque l’amaigrissement du porcelet et actuellement ceux des filières aviaires comme l’influenza aviaire. Dans mon équipe, nous faisons plus précisément de la génétique virale : nous regardons les ADN et les ARN des virus. Ce sont les molécules qui portent les différents gènes du virus et lui permettent de se multiplier. En effet, les virus se répliquent rapidement en s'implantant dans une cellule vivante que ce soit des plantes, des animaux ou de l'Homme. Pour mieux comprendre la fonction de ces gènes, nous avons notamment recours à la génétique dite « inversée ». Cela consiste à construire des clones infectieux, c’est-à-dire des virus dont on a modifié l’ADN ou l’ARN. Grâce à ces virus clones nous pouvons comprendre comment ils se développent et concevoir des vaccins pour les maîtriser. Nous disposons de multiples modèles de virus qui sont utilisés pour identifier l’apparition d’un nouveau pathogène. Par exemple, nous étudions depuis des années les coronavirus animaux. Dans le cadre de la crise Covid-19, nous avons été sollicités pour mettre à disposition les modèles de coronavirus, afin de tester l’efficacité des masques dans différentes conditions.

"Être prêts face à l’émergence de maladies" 

Ce que j’aime aussi dans mon métier, c’est que l’on ne se limite pas au travail en laboratoire, nous contribuons à lutter concrètement contre des menaces sanitaires. Un de mes objectifs : se tenir prêt en cas d’alerte. Il faut savoir qu’il y a émergence d’une nouvelle maladie régulièrement par exemple tous les huit ans pour les coronavirus chez l’Homme. Pour se préparer à ces nouvelles émergences, avec mon unité, je fais beaucoup de veille bibliographique ainsi qu’à travers les réseaux de signalements. Nous sommes constamment en alerte pour surveiller les maladies qui circulent ailleurs. Par exemple, lors de l’épizootie de diarrhée épidémique porcine causée par un coronavirus qui a fait plus de 8 millions de morts chez les porcs aux États-Unis en 2013, nous nous sommes préparés pendant un an, nous avons mis en place des outils de diagnostic et lorsque le virus est arrivé en Europe en 2014, nous étions prêts pour le détecter aussitôt dans les élevages. Nous suivons également de près les virus qui circulent en France. Nous sommes parfois amenés à intervenir pour identifier une maladie sur des animaux importés dans les aéroports. Nous collaborons également beaucoup avec les professionnels des filières afin d’avoir les informations sur les problèmes de santé des animaux dans les élevages et prévenir la propagation de maladies.

"Etudier l’animal dans son environnement"

La diffusion des virus pourrait également avoir de graves conséquences économiques dans les élevages. Nous apportons des conseils aux autorités sanitaires et aux vétérinaires pour la mise en place de mesures de contrôle afin de ralentir la propagation d’un virus. Pour cela, il est important de comprendre comment l’élevage est organisé pour proposer des solutions concrètes. Avec les équipes d’épidémiologistes, nous sommes en relation étroite avec les vétérinaires et les éleveurs afin d’appréhender l’animal dans son environnement. Nous disposons ainsi de tous les éléments de terrain pour proposer ensuite des mesures adaptées à chaque situation. C’est grâce à la réactivité de tous les acteurs que nous pouvons être réellement efficaces et pour cela, la relation de confiance est primordiale.